Hier, il a cassé son harnais. Il était tard, ou tôt, tout dépend le point de vue. La musique était à fond sur la télé Philips, écran full HD, 1080p, avec barre de son intégrée. Pour une télé qui doit avoir plus de 15 ans, quand on est bourré, à plein volume ça sonne comme du miel aux oreilles. J’avais invité des potes chez moi, après avoir bu une, deux, trois pintes dans un bar. La soirée était cool, on avait envie de prolonger. J’habite à côté des bars, direction chez moi. On fume à l’intérieur. Les murs sont encore blancs. Par contre j’aime bien aérer. J’ai ouvert et j’ai mis le chat en sécurité. Hop, on attache la laisse, qui est attaché à la corde, qui est attaché au frigo. J’ouvre la fenêtre de la cuisine. Il sort. Je titube.
Florian dort sur le fauteuil. Il a dormi dès la première seconde où il y a posé ses fesses. Damien et Valentin, dansent, rigolent, parlent fort, fument, boivent et rient encore. Et je les accompagne. J’ai presque oublié que j’avais un chat. Je l’entends se plaindre. Je vais voir par la fenêtre. Je vois qu’il est à moitié attaché à son harnais. Ce qui constitue le collier de son harnais s’est détachée. Je verrais plus tard qu’il s’était en fait cassée. Une des deux dents de l’attache en plastique du cou s’est volatilisée. Le cou n’est plus fonctionnel capitaine, le fauve est lâché. Voyant cette effroyable scène, je sors par la fenêtre. J’escalade le rebord intérieur, haut de quatre-vingt centimètres et large de cinquante. L’Everest en claquettes. J’agrippe l’extérieur de la fenêtre de gauche, le rebord de celle de gauche. Et je me hisse. Je suis Spider-man. Il fuit. Il saute avec son demi harnais sur le rebord de l’autre fenêtre, celle du salon. Sous le ventre, derrière les épaules la dernière lanière tient bon. Derniers détails. La corde n’est pas assez longue pour qu’il rentre par la deuxième fenêtre, celle du salon. Sa fenêtre préférée pour essayer de rentrer, évidement. Par précaution, je la laisse à moitié fermée. Bloquée depuis l’intérieur pour qu’il ne puisse pas l’ouvrir en poussant. Elle l’était à ce moment là. Je saisis l’opportunité qu’il ne soit qu’à quelques centimètres de l’intérieur. Je l’attrape. Je demande à Valentin d’ouvrir la fenêtre. Ou je demande à Damien. Ou je le fais tout seul. Dans la précipitation, je le jette à l’intérieur. Dans la précipitation, j’ai surtout oublié qu’il était encore à moitié attaché. Du coup il pend par le ventre deux secondes. Le temps que je saute et que je le détache. (Aucun chat n’a été blessé durant cette scène, je suis Spider-man). Je demande à mes soldats du soir de barricader les fenêtres. Le chat est de nouveau parmi nous. En sécurité.
Je me rapproche des boutons sur la télé (la télécommande a tiré sa révérence depuis longtemps). Et j’appuie. Sans doute, inconsciemment, pour convaincre les voisins d’appeler la Police. Je mets le son à fond. Un quart de pastis, trois quart d’eau, je reprends un verre. C’était tout ce que j’avais à offrir. Il me restait bien de la vodka mais plus de grenadine pour l’adoucir. L’eau du robinet était la seule options du soir. Un pastis, c’est très bien.
Ce soir tout le monde dort chez moi. Mon appart n’est pas très adapté, mais vu l’état de nos soldats, même un banc public aurait fait l’affaire, au moins pour deux ou trois heures. Le temps de se remettre les idées au clair et le cerveau à l’endroit. Florian a déjà choisi sa place depuis longtemps. Les autres se débrouilleront. Il reste le canapé deux places, premier prix Ikea. Un espèce de futon où l’on est obligé de ramener ses genoux à sa poitrine. Et, le sol. Valentin a, étonnement, choisi le sol. Le tapis en jute. Damien, la séance de yoga. Tout le monde s’est endormi un peu avant 8h du matin. Le soleil était levé depuis plusieurs dizaines de minutes. C’était l’heure.
A dix heure, j’ouvre les yeux. Valentin avait finalement décidé qu’un lit serait mieux qu’un tapis. Je ne devais pas prendre trop de place. À midi, mes yeux ne se referment plus, je me lève, je vais fumer du THV. Damien ouvre doucement les yeux pendant que je roule. Florian, qui a fini sa nuit sur le ventre, le dos en arc de cercle, se retourne et reprend conscience. Valentin ne tarde pas à nous rejoindre dans le salon. J’ai pas de café. Le petit déjeuner, ça sera soit une clope, soit un joint. J’ai fait mon choix avant les autres. La faim me tord le ventre. Je ne suis pas le seul. Il faut regagner des points de vie. Un burger. C’est une bonne idée ça, un burger.

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